[…] C’est pour ça que je veux partir, loin, seule, sans prévenir personne: pour exister.
je relis mes notes, en diagonales; j’écris beaucoup sur la faim, la nourriture, le vomi, les difficultés de manger et mon rapport troublé à mon corps; mais je ne pourrais jamais faire une édition de ça, je ne pourrais jamais sortir ça comme ça, car je ne veux pas que les gens pensent que j’ai des troubles alimentaires, des jeunes femmes qui ont des troubles alimentaires croyez-moi j’en connais un certain nombre, croyez-moi mon cas n’est pas comparable aux leurs, croyez-moi je n’ai que des petits soucis, rien du tout, ne vous inquiétez pas pour moi ça n’en vaut pas la peine, ce n’est rien comme dirait Julien Clerc.
tränen sind der regen für’s gesicht
les achats compulsifs (et inutiles) du jour (ça faisait longtemps) s’élèvent à 40€, et comptent: un gros carnet, des pochettes pour ranger mes papiers (jusqu’ici ça va), un gros bâton de colle, un surligneur jaune pastel, deux rouleaux de scotchs décoratifs, 240 gommettes oranges et 240 gommettes bleues.
J’ai pas posté sur errances depuis une semaine mais j’ai pas fait exprès !
promis j’ai écris tous les jours, j’ai juste oublié de partager. Oublier c’est pas le bon mot, en réalité je suis rentrée dans un cercle vicieux: à force de pas poster, ça m’a donner peur de reposter, comme si j’avais besoin de faire un comeback impressionnant, ça a mit trop de pression sur le truc, je pouvais plus poster n’importe quoi, alors que j’adore poster n’importe quoi.
Je vous assure que c’est un accident, la première fois je crois que j’ai beaucoup écris mais rien envie de poster, pas envie d’être lue, et puis je me suis habituée à écrire sans poster, et puis j’avais vraiment pas envie d’être lue, pas envie non plus de plomber l’ambiance (même si je vous assure que ça va), enfin voilà quoi, je vais m’y remettre, je me dis que j’ai fais une pause assez longue pour qu’on m’oublie, je peux revenir en catimini.
samedi sera disco et c’est tout ce qui compte
Surtout — peur de ne plus avoir rien à dire. Peur de ne plus être prise au sérieux.
C’est pour ça que je n’ai pas écrit depuis deux jours: je mangeais.
J’ai oublié d’écrire à ce sujet mais figurez-vous que j’ai perdu mon plat qui va au four. Ça fait bien deux mois maintenant, je l’avais prêté à Ariadne et elle me l’avait pas rendu, mais comme ça fait deux mois que je me fais pas vraiment à manger je m’en étais pas rendu compte. C’était un coup dur de l’avoir perdu parce que j’avais un élan de motivation pour cuisiner mais que je pouvais pas faire sans, et j’avais l’impression que la vie voulait m’empêcher d’essayer d’aller mieux. Heureusement Ariadne vient de m’envoyer une photo, elle l’a retrouvé dans son placard, entre la semoule et les conserves. Ça fait un moment qu’il doit traîner là mais comme elle se nourrit pas plus que moi elle ne l’avait pas remarqué.
11:47 j’ai quitté le café presque à contre-coeur en me disant qu’il fallait que je prenne le temps de m’y poser plus souvent.
En 2022, l’une des résolutions d’Ariadne est de choper un quarantenaire; de mon côté, je suis de plus en plus encline à un trentenaire du saint germain.
Avant qu’on commence à se fréquenter je t’appelais Jean. Jean c’était une image idéalisée que je me faisais de toi. Jean n’a pas duré bien longtemps.
un jour sûrement pas si lointain jean sera quelqu’un d’autre
[…] peut-être que je vais avoir peur, sûrement la boule au ventre, probablement l’envie de vomir, je fumerai plus que je ne mangerai, mais je vais quand même passer une super soirée parce qu’on va fêter l’anniversaire d’une super copine avec plein de supers personnes. Et ça va être chouette.
extrait de la bd de Liv Stromquist « dans le palais des miroirs » :
« À l’âge de 61 ans, lors d’un séjour au lac Léman, l’impératrice est poignardée à mort par un anarchiste italien. Chaque fois que Luigi Lucheni (c’est son nom) est interrogé sur le mobile de son crime, il répond invariablement: qui ne travaille pas n’a pas droit à manger !
Son argument est entendable, mais l’exemple de Sissi n’est pas le mieux choisi. »
Rire jaune
j’ai dû interrompre ma lecture parce que mon oncle vient de dire qu’il avait payé son sapin 50 euros et certes c’est un beau sapin, grand, chic, mais ça m’en bouche un coin. J’ai hâte d’être adulte d’avoir une maison et un salaire qui me permet de mettre 50€ dans un sapin de Noël.
16:02 j’ai peur (je suis en colère) je suis triste j’ai peur
16:18 [j’ai pas envie de mettre ça sur errances]
16:43 j’ai fais des cookies mais on m’a coupé l’appétit
16:59 un jour j’irai à Bagdad
En me regardant dans le miroir je me suis inquiétée d’avoir les dessous des yeux noirs, comme si j’avais un coquard mais seulement sur les paupières du bas; en fait ça s’appelle des cernes, et ça veut dire: louise va dormir
je suis dans ma chambre d’adolescente je me suis cachée pour fumer à la fenêtre j’ai la boule au ventre mon père a insulté ma mère et ma mère lui a claqué la porte au nez j’ai l’impression d’avoir 14 ans à nouveau, sauf qu’à 14 ans je fumais pas je savais pas que mon père insultait ma mère et ma mère avait peur de mon père
vivement le retour à la vie seule je vous le dis
qu’une chose à dire: bon courage à toustes
Aujourd’hui je me suis faite la réflexion très sérieuse que j’allais avoir besoin de vacances pour me remettre de ces vacances familiales (et c’est que le troisième jour)
Je sais que tu m’aimes mais je crois aussi que si je partais demain, tu n’en serais pas attristée. Et honnêtement, je ne peux pas t’en vouloir. Parce que toi et moi on sait comment ça va finir, donc pourquoi attendre plus longtemps ? J’ai peur que tu te le demandes.
Je ne l’avouerai jamais mais je rêve de savoir danser, chanter, je rêve que l’on me prenne par la taille et que l’on m’entraîne dans un mambo endiablé. J’ai des étoiles dans les yeux à voir des gars s’affronter à coups de pirouettes avant la bagarre. Moi aussi je veux me battre en frappant l’air de mes jambes. Je veux me sentir libre au point de danser dans la rue, je voudrais que tout le monde danse dans la rue, qu’on soit tous et toutes habillées de jaune, rouge, bleu électrique. Qu’on sorte nos émotions en chansons, qu’on hurle notre colère et qu’on déclame notre amour.
Les comédies musicales c’est un monde magique (dans lequel je voudrais vivre)
« Je parie que tu es écrivain. Ou apprenti écrivain. Ne t’étonne pas: j’ai appris à reconnaître les gens de ton espèce au premier coup d’œil. Ils regardent les choses comme s’il y avait derrière chacune d’elles un profond secret. […] On ne peut pas vivre l’instant et l’écrire en même temps. […] Voilà ton erreur. Voilà l’erreur de tous les types comme toi. Vous croyez que la littérature corrige la vie. Ou la complète. Ou la remplace. C’est faux. Les écrivains, et j’en ai connu beaucoup, ont toujours été parmi les plus médiocres amants qu’il m’ait été donné de rencontrer. Tu sais pourquoi? Quand ils font l’amour, ils pensent déjà à la scène que cette expérience deviendra. Chacune de leurs caresses est gâchée par ce que leur imagination en fait ou en fera, chacun de leurs coups de reins, affaibli par une phrase. Lorsque je leur parle pendant l’amour, j entends presque leurs « murmura-t-elle ». Ils vivent dans des chapitres. »
Extrait de La plus secrète mémoire des hommes, Mohamed Mbougar Sarr
Je regrette de ne pas avoir quelqu’un en qui croire. Un Dieu, des Dieux, à blâmer pour tout le malheur du monde. Sans eux, je porte ce poids sur mes seules épaules. De manière incroyablement narcissique, je suis responsable, toujours, de près ou de loin. C’est moi le lien entre toutes les personnes que j’aime, moi la raison de tous leurs maux. Moi car je ne crois qu’en moi-même. Moi car je suis la personne dont je doute le moins. Moi la sans-religion, la pragmatique, celle qui ne croit qu’en la science, la Sainte Science.
Pourtant ce serait tellement plus facile de croire. D’avoir quelqu’un à blâmer. D’avoir quelqu’un à espérer. D’avoir instantanément une excuse à tout. De tout envisager sous un autre oeil. De croire — plus fort que ça, de savoir — que tout arrive pour une raison. Une force divine qui explique le mal par un bien à venir. C’est si beau.
Ça guérit, la croyance. C’est magique.
Peut-être que ça me manque, un peu. Mais je ne regrette pas mon éducation. Je ne veux pas faire marche-arrière, prendre un « nouveau départ », quoi que ce soit comme ça. Je suis bien avec ma Science. Et en réalité, je ne cherche pas quelqu’un en qui croire. Je cherche quelqu’un à blâmer.
Quelqu’un d’autre que moi pour se prendre dans ma gueule toute ma colère, ma tristesse, ma fatigue.
J’en ai marre de me battre contre mon divin alter-ego.
[c’est un texte que j’ai écrit un soir d’été, à Palerme, sur le balcon de mon auberge de jeunesse, peut-être un peu ivre à l’Aperol, évidemment triste. Je le poste maintenant même si c’est pas dans les règles parce qu’une lecture me l’a rappelé et je crois que je voudrais le continuer plus tard]
[…] Donc pour résumer: le féminisme me quittera jamais. Parce que même quand je veux pas en parler, même quand je veux me concentrer sur moi et pas me mettre la pression à vouloir sauver tout le monde, le féminisme me rattrape toujours. Correction: le patriarcat me rattrape toujours. Il me laisse jamais en paix. Je peux pas avoir le luxe d’éviter de parler féminisme, parce que j’arrêterai jamais de me défendre. Je me laisserai jamais faire. Je craquerai pas. Même quand j’ai pas l’envie, même si j’ai pas l’énergie, je me battrai toujours, que je le veuille ou non je peux pas faire autrement.
Être une jeune femme de 20 ans qui a du mal à se nourrir et à se regarder dans une glace
Être une femme tout court
Ça suffit pour se faire attaquer
Et on se fera toujours attaquer donc à quoi bon essayer de plier ?
Je ne vous parle pas d’en haut. Je vous parle d’en bas. Je vous parle d’un endroit où la peur, la responsabilité et la culpabilité s’emmêlent. D’un endroit où on est seule pour affronter les hommes. D’un endroit où l’on n’est, ni la maman ni la putain; je vous parle d’un endroit que vous les hommes ne connaissaient pas. Vous ne connaissez pas la douleur des règles ni celle de l’accouchement. Vous ne connaissez pas l’injonction d’être mince, d’être belle, d’avaler des pilules pour ne pas avoir enfants, d’être épilée, bien habillée, pas trop long, pas trop court, pas trop surtout. Mais pas trop quoi ? Être une femme sans être une menace, être une femme en restant à sa place, mais laquelle ? Celle tenue par les hommes dans un cadre restreint ? Je vous parle d’un endroit qui n’existe pas. D’un endroit pour lequel je me suis battue. Le droit d’avoir ou non des enfants, le droit d’avoir une sexualité libre. […]
la suite m’intéressait moins
Ariadne est venue chez moi, j’ai fais mon ménage et elle a travaillé, on a fumé et on a parlé des garçons qui sont nuls et aussi que la vie c’est souvent compliqué et se nourrir encore plus. On a quand même manger de la semoule (bien beurrée) avec de la ratatouille, en écoutant Jeanne Mas et France Gall. Je crois qu’on se fait du bien elle et moi, un peu comme un pansement qui répare des deux côtés. Je sais pas si ça fait sens et je sais pas si elle pense pareil. Parfois j’ai peur de la ramener en bas alors qu’elle a franchement pas besoin de ça (moi non plus).
franchement samedi soir j’ai écrit un truc tellement niais que je pouvais pas le poster ici. j’ai une réputation à assurer voyez-vous
ce weekend j’ai mangé en tout et pour tout une assiette de pâtes crème/légumes je suis pas sûre que ce soit un très bon bilan mais je pouvais rien avaler d’autre. j’ai peur de filer un mauvais coton
« une bonne victime est une victime morte, parce qu’il n’y a pas besoin de la croire. »
Nicolas Hulot peut bien aller se faire foutre
J’ai encore pensé à toi aujourd’hui, en retombant sur le briquet que je t’ai chipé. Je crois que je pense trop souvent à toi. Je détesterais que tu le saches. Je suis trop orgueilleuse pour l’admettre. Mais merde, tu m’as marqué.
Dans mes souvenirs il n’y a que toi.