je fais un long trajet à pied jusqu’à chez moi, dans la nuit, la faim au ventre. j’ai quitté Adl à mi-chemin.
sur le trajet, je pense à la maison sans les murs sous le pont à côté de chez moi, à mon vélo qui n’a pas de dynamo, à la discussion qu’on a eu avec Adl, au garçon qu’on a croisé et qui m’a donné des frissons parce que j’ai cru que c’était un visage familier (en fait non), à la rue Dupont des loges qui est quand même super longue parce qu’elle m’a tenue une musique entière, aux vacances-qui-ne-seront-pas-vraiment-des-vacances, à mon dos qui me tue
une fois que je me rapproche vraiment de l’arrivée, je passe à côté de mon ancien travail.
l’avantage d’avoir bossé dans la rue voisine, c’est les regards jaloux de mes collègues parce qu’iel se tapent 1h de transport non payée et pas moi
l’inconvénient, c’est qu’une fois la nuit tombée, la lumière encore allumée dans le bâtiment détache de l’obscurité toutes les pièces que je connais par cœur, entre lesquelles j’ai couru, désœuvrée, pour un smic
tout se voit depuis la rue : les tableaux en liège, les photos des employés sur le mur, les chaises et les tables, le panneau des fiches de poste
chaque objet qui me brille à la gueule, comme exposé derrière la fenêtre, comme un décor, m’angoisse profondément
enfin bref, je suis rentrée maintenant