Errances

Quelles sont toutes les façons dont vous avez gagné de l’argent?
…

Assumer le regard des autres.
Difficile.

L’enfant propose un jeu. Il y a distribution des rôles, mise en place d’un fil conducteur. Le jeu peut être étrange, surréaliste, voir même cruel.
Mais il reste un jeu, il est programmé, intentionnel. L’enfant est brut. Il ne contrôle pas, ne se demande pas ce qu’il doit être aux yeux des autres.
Il ne comprend pas qu’on ne l’accepte pas tel qu’il est, dans sa forme entière et vraie.
Devenu adulte, les jeux sont inconscients. On ne joue plus vraiment, on est quelqu’un d’autre. On s’installe derrière un masque selon les occasions, on s’adapte au format social adéquat. Notre « nous » réel, celui que nous montrions dans sa totalité étant enfant, se cache en nous,
à attendre le signal : ça y est, le jeu est fini, tu peux sortir.

Petite pensée aux enfants samedi qui trouvaient mes dessins « marrants » alors que les adultes les trouvaient « inquiétants ».

il y a parfois
des sons des mots qui
vous percent
à froid
vous hérissent
le poil
alors
les yeux fermés
vous laisse emporter
dans d'autres lieux
ceux qui
sont libres
aux sensations
sont communs à tous
propres à chacun.

Le vert est doux et piquant à la fois. Doux comme lorsque l’on s’allonge sur l’herbe fraîche à l’ombre d’un arbre. Arbre également vert, d’un vert éphémère. Il peut être piquant et froid comme les épines d’un sapin lors d’une sortie d’hiver en forêt. Il peut sentir bon et chaud lorsqu’on sort les escargots du four pour le 24 décembre. Il peut être triste et sec lorsqu’il est réparti sur le sol 15 jours après Noël. Il peut être moelleux lors de mes perpétuelles siestes devant Hercule Poirot.

Je précise que je skie mieux que Fabienne, hein.

Liste d’ images dont on se souvient sans savoir pourquoi :

Ma sœur, son pantalon sur les genoux, elle ne ferme jamais la porte des toilettes à clés.

Les milliers d’étourneaux qui se regroupent à Villejean. Nuages d’ailes noires qui se forment et se déforment, se séparent, se regroupent comme une valse sur un ciel sombre.

Le cadavre d’un chat mort sur un trottoir, la rosée met en valeur son poil argenté.

Le clochard qui fait un doigt d’honneur dans le dos de celui qui lui a refusé une pièce.

Une pluie torrentiel se mélangeant au gravier blanc, comme si des litres de lait c’étaient déversés dans la rue.

Il faut se concentrer, entrer dans la page. Certains ont déjà la tête plonge dans la feuille anciennement vierge. D’autres attendent et observent. Les stylos et critérium commencent à s’agiter, frénétiques. Il faut écrire, retranscrire le moment présent. Eila s’arrête, regarde sous la table et se remet à l’ouvrage. On aperçoit des coups d’œil lancés, discrets. Et lorsque quelqu’un entre dans la pièce, étranger et ignorant ce qui est en train de se passer, toutes les têtes se tournent vers lui. Bête curieuse, il s’empare de son café et ressort rapidement. On croise parfois un regard, éphémère tête à tête. On détourne les yeux, comme gêné d’avoir été pris sur le fait de cette secrète observation. Gwénaëlle regarde longtemps, comme s’il fallait retranscrire avec précision le moindre détail d’une personne.
Une conversation vient troubler le silence presque religieux. Les deux coupables s’en rendent compte, et s’empressent de disparaître. Les pages se noircissent. Certains d’entre nous font une pause d’autres ne veulent rien rater. Brice a l’air de douter ou d’attendre quelque chose. Encore trois minutes. Un léger ralentissement, puis deux personnes entrent et s’installent. Les stylos reprennent de plus belle. Nos deux visiteurs sont plus tenaces que les précédents, ils sont décidés à rester.

« je pense que l'autobiographie est impossible. Je pense qu'on ne peut parler que de ce que l'autre sait […]. En d'autres termes, celui qui écrit une autobiographie ne parle jamais de soi mais de chacun qui la lit. Proust n'existe pas. Il est seulement notre miroir. Il est nous. Il n'est pas lui. Je ne sais pas si c'est vrai, mais je pense qu'on ne peut jamais dire quelque chose qui soit personnelle. On ne peut qu'une chose collective. »
D. Radrizzani, Le Dessin impossible de Boltanski, Buchet chastel, les cahiers dessinés, 2010.

mélange, mélange, je me perds dans ce fouillis cervical.

Pile de cinq livres superposés les uns sur les autres de façon aléatoire, le plus petit au centre. Il parait être écrasé par le poids du premier ouvrage, qui lui est démesuré. Mince et plus ancien, un équilibre est maintenu par cet élément déjà très fragile. Au-dessus de lui, un compagnon du moins, par son ancienneté. Couple solidaire, comprimé entre trois blocs plus lisses, plus brillants, plus modernes dans leur aspect.
Le petit dans l’ombre est muni d’un marque page, morceau de feuille qui je crois semble être présent depuis bien longtemps. Son ami d’époque, lui est solitaire n’ayant personne pour l’accompagner. Il n’a comme distinction qu’une page apparemment pliée en son coin. Le mastodonte du haut, les obligeant par son poids à rester dans une position très délicate. Pour les soutenir dans cet effort, deux coéquipiers de douleurs.

Le carré de lumière projeté sur le mur blanc de la chambre/salon, ce matin, à 08:43, boulevard de la Duchesse Anne. J’ai les cheveux trempés et je devrais me presser mais mes yeux sont indéniablement attirés par cette masse changeante provoquée par l’ombre des conifères. Elle semble se transformer en cellules intrépides et parfois même on y reconnaît un visage ou une bouche qui s’ouvre sur nulle part.

jeux d’ombres de boltanski…

Une maille à l’envers, une maille à l’endroit. Des gens pourraient dire que mon pull est vert et je leur répondrais que c’est un peu plus compliqué que ça. Les mailles qui le composent sont d’un vert plus jaune que bleu. C’est un vert chlorophylle qui rappelle la campagne, c’est un verre d’air frais. Mais la couleur de la laine reste un vert synthétique, un verre tinté. Un vert tinté de vertu ? Méfiez vous ! car au tournant du coin coin, derrière le col vert se cache la forêt !

Bonus photo à 30€, 45€ si vous en prenez deux !

Je me souviens de la première liste de course que l’on a fait ensemble. Peut-être parce que ce jour là, j’ai pris un caddies, qui comme d’habitude m’a donné des châtaignes dans les mains, et que j’ai fais les courses comme une vraie madame.
Lait de coco
Pâte de curry
Poulet
Riz
vin
Nougat glacé
J’ai mis en avant mon potentiel « bonne à marier » pour te prouver que j’étais la bonne !

photo : Sylvie Fleury