17 octobre 2014
16 octobre 2014
15 octobre 2014
Forest.
La Forêt.
Forêt silencieuse, aimable solitude,
Que j’aime à parcourir votre ombrage ignoré !
Dans vos sombres détours, en rêvant égaré,
J’éprouve un sentiment libre d’inquiétude !
Prestiges de mon coeur ! je crois voir s’exhaler
Des arbres, des gazons une douce tristesse :
Cette onde que j’entends murmure avec mollesse,
Et dans le fond des bois semble encor m’appeler.
Oh ! que ne puis-je, heureux, passer ma vie entière
Ici, loin des humains !… Au bruit de ces ruisseaux,
Sur un tapis de fleurs, sur l’herbe printanière,
Qu’ignoré je sommeille à l’ombre des ormeaux !
Tout parle, tout me plaît sous ces voûtes tranquilles ;
Ces genêts, ornements d’un sauvage réduit,
Ce chèvrefeuille atteint d’un vent léger qui fuit,
Balancent tour à tour leurs guirlandes mobiles.
Forêts, dans vos abris gardez mes voeux offerts !
A quel amant jamais serez-vous aussi chères ?
D’autres vous rediront des amours étrangères ;
Moi de vos charmes seuls j’entretiens les déserts.
Chateaubriand.
À verse
Il attendait là, patiemment assis à l’arrêt de bus
Il pleuvait
À côté de lui y’avait un gros pâté de gerbe
et il se dit
C’est vendredi matin.
Ses pieds étaient à la limite du goudron mouillé. Il se dit
Faudrait pas que je mouille mes chaussures, y’a un trou sous celle de gauche.
Puis il regardait droit devant lui. C’était drôle
y’avait une femme qui courait
elle était en talons sur les pavés, avec son « trench »
elle se couvrait les cheveux avec son sac à main
Il se dit
Alors, voyons si elle se pète la cheville.
La pluie était de plus en plus forte
Le ciel, gris clair, très lumineux, c’était toujours comme ça
pour les averses passagères
mais celle-là commençait à l’être depuis un peu trop longtemps
et bientôt elle perdrait son statut de passagère,
tant pis
il aimait bien la pluie
surtout quand il était à l’abri.
Il écoutait les pas sur les pavés
des quelques rares personnes qui osaient s’aventurer là
ou qui s’en foutaient, avec leurs beaux parapluies
et qui pouvaient marcher en couple tellement ils en avaient de grands.
Mais lui il voyait bien que leur pantalon commençait à s’imbiber d’eau par le bas.
Y’avait aussi des oiseaux
qui foutaient un bordel pas possible
et il se dit
Comment ils font, les pauvres, où est-ce qu’ils se mettent à l’abri
Et il s’imaginait un moineau, cette espèce de boule de plumes
trempé, trop lourd pour voler
et ça le rendait triste.
Alors dans son champs de vision il vit courir une petite gamine
elle avait un manteau en toile cirée rouge vernis.
Quand il plissait les yeux ça faisait une espèce de tableau
flou, gris, avec un seul point rouge, et il trouvait ça beau.
Il se dit
Qu’est-ce qu’elle fait là toute seule, cette gamine
Avant de voir que ses parents arrivaient sur la droite avec un grand parapluie
le parapluie assez grand pour les couples
la mère tenait un petit parapluie rouge dans la main
et il se dit
La gamine a dû le balancer pour courir sous la pluie
Et maintenant c’était sa mère qui courait après elle en hurlant
et la gamine courait et riait
et la mère courait et gueulait
et elle finit par rattraper la gamine par le bras, et retourner près de son mari.
La gamine ne riait plus.
Mais lui il comprenait plus la gamine que la mère.
Et puis ils disparurent.
La pluie commençait à diminuer
il l’entendait sur le toit en plexi de l’abri bus
Et il se dit, comme s’il parlait à l’averse
Encore un peu et tu perdait ton statut de passagère.
Plus personne ne passait devant lui
Ça sentait le vomit et la pluie sur le goudron, et l’herbe pourrie
Toutes ces odeurs lui montaient au nez
Les gouttes sur le plexi étaient de plus en plus espacées
Il se dit
C’est la fin
Et c’était la fin.
Il se leva et partit.
Antonio Machado et Errances
« Toi qui chemines, sache qu’il n’y a pas de chemin, il faut juste marcher »
Antonio Machado