C’est un capharnaüm ses cheveux, je pense qu’elle ne se coiffe pas. Ils sont tous hirsutes, il semble que ça ne la chagrine pas. On discute, elle me retrace son voyage. Elle dit que Syracuse mérite d’être explorée. Les amphithéâtres de Sarausa, la ville de Catane et l’Etna. Elle a noué en huit sur ses épaules une veste verte, sans ouatine, mais suffisamment épaisse pour la parer des coups du froid, enfin j’imagine. C’est du velours côtelé quand même.
Elle lui sied bien au teint. Elle est anxieuse à souhait. Elle doute, elle néglige toutes ses idées. Pourtant, elle foisonne d’espiègleries. Elle est rusée. Elle a même inventé des chaussures en torchis. J’aurais aimé la rassurer mais en vain. Comme elle, je me ronge les sangs, je regrette l’été, je suis incertain, on aurait juré deux convalescents.
Sur le trottoir, il y a des flaques de couleur, souvent.
J’en ai prise une violette en photo.
Le soir, en rentrant, A. a explosé la théière de mes 18 ans en mille morceaux de verres coupants.
Chambre blanche, rideaux noirs.
Je regarde par la fenêtre.
Lumière grise.
Je suis là à manger mes croûtes de pizza
À moitié caché dans mes manches
Le garçon me regarde
Ou du moins c’est ce que je crois
Je me dis que je resterai toujours ce garçon qui mange des croûtes de pizza
En contrebas j’ai vu,
Entre parenthèses, place d’Italie,
Un pépin blottit en chien de fusil.
Sa narine vint à le gratter, aléa d’eczéma.
Il se gratta, le pépin, blottit en chien de fusil.
Entre parenthèses, avenue de Choisy,
En contrebas et vice versa.
Qui courbera l’échine de l’acariâtre au croquignolet ? La providence ne servira que le fou clairvoyant.
Toi qui crois connaitre la théurgie. Toi qui crois connaitre la goétie.
L’illusionniste lui seul peut s’approcher de la magie.
Quand ce dernier ignore tout de son pouvoir d’ignorer, d’ouvrir le rideau rouge sur un monde onirique.
Quand ce dernier germera, il nous donnera les fruits d’une réalité atypique.
Je ne te reverrai jamais, dis-je, et lui : « regarde tes mains. » Elles sont toutes écorchées et sous les ongles une nappe de copeaux argentés. Nous sommes ex aequo. Ma question passe à la trappe. Sa nuque à lui, il y a une heure de ça, portait un bijoux brillant très simple. Une chainette avec en pendentif des initiales. Cadeau ou trophée de guerre, la breloque qui décorait son cou, avait laissé une marque sur sa peau en s’en allant. Elle avait disparu. Il louvoie devant moi, parce qu’il a bu probablement, ou qu’il peine à reprendre son souffle, mais son cou est distinct. Faut dire que dans la course on ne s’est pas ménagés. Pourtant j’ai épié les recoins et mes cuisses claquaient et ma bouche était sèche. Je voulais me planquer, l’esquiver même fondre. Derrière je l’entendais tonner, rouspéter avant qu’il se mette à cracher. Tout a changé quand son épaisse bile en monticules à commencer à garnir le sol. C’est des agglomérats de bave qui se sont pavés sous mes cuisses qui claquaient toujours. Mon pieds sursaute. J’ai glissé sur sa morve, mon coude a cogné la jardinière, mais mon genoux était bien contre un mégot. Il y a cinq doigts sur ma main droite mais c’est souvent l’ongle de mon majeur qui mécaniquement se croche. C’est dans son sautoir ici qu’il est venu se pincer. Il n’a pas ressenti le pincement. Hâtivement, il m’a repris la photo de nous, dans mon blouson. Celle ou ma frange est biscuit et ses dents sont caries. Son souffle est court toujours, à bout, il s’éloigne. Dans la perte nous sommes ex aequo. Comment on fait s’épouser deux lettres?