Je tente souvent de me souvenir de la première et dernière fois où je suis partie à Cotonou quand j’avais peut-être cinq ans.
Ce qu’il me reste de ce brouillard est:
- la vision d’une tortue
- d’un lézard (ou caméléon je ne sais plus trop) qui était plat comme une feuille et rampait sur le mur
- mais aussi une fontaine blanche.
Mais le souvenir auquel je m’accroche le plus par peur de le perdre est ma première et dernière rencontre avec ma grand-mère maternel.
J’aurais souhaité ne pas être autant timide et ne pas m’être cachée derrière ma mère.
Mais je suis heureuse de me rappeler du bonheur sur le visage de ma grand-mère en me voyant.
J’espère ne jamais l’oublier.
« – ça va toi ? (…tu vas pas te tuer aujourd’hui ?)
– oui oui ça va (pas aujourd’hui) »
(ça vit et toi ?
es-tu dans c’vice :
danser à tuer l’ennui ?
desseins enfouis :
furibonde, j’ai dupé l’onde
pour fuir).
J’avais l’intention de m’appliquer à faire un chouette dessin ce soir, mais j’ai passé tellement de temps à chercher mes affaires que l’envie m’est totalement passée.
Je me cherche peut-être des excuses mais il me semble que de toute façon il est trop tard.
Bonne nuit à tous.
L’école a organisé une soirée costumée caritative. Le lieu de réception est chic: moulures au plafond, tapisserie rococo et meubles époque Louis XVI. De l’extérieur ça ressemble fortement à la place de l’opéra. Etant chargée de l’organisation, je cours donc partout pour accueillir les invités, répondre aux questions et diriger les serveurs engagés pour l’occasion. Je porte un masque représentant une tête de girafe mauve en papier mâché. Pour le costume, j’ai décidé de resté assez classique et j’ai choisi une robe de soirée longue accompagnée de quelques bracelets. Les déguisements étant obligatoires pour l’événement, tout les convives portent des masques, la plupart représentant des têtes d’animaux en papier mâché coloré comme le mien, mais d’autres, plus aisés, sont incrustés de pierres précieuses et de perles. Pour le reste, costumes, robes et capes sont de mise, le tout de grande qualité et soigné. Pour l’instant tout se déroule au mieux et j’arrive à contrôler le stress de l’organisation.
En plus d’un prétexte pour faire la fête, cette soirée doit surtout servir à obtenir de nouveaux mécènes pour l’école, qui commence à manquer de fonds. L’alcool coule à flots et l’ébriété commence à gagner les invités. Grâce à mon rôle de manageuse, j’ai réussi à faire rentrer en douce L., N. et E. Tout le monde danse mais L., à cause de son masque extrêmement grand, fait un grand trou dans le plafond, détruisant par la même occasion, le papier peint d’époque. La panique me gagne car elles ne sont pas formellement invitées à cette petite sauterie. Je me résigne à aller voir la directrice pour lui expliquer la situation. Celle-ci m’attend, assise dans un énorme fauteuil en cuir à la manière d’une mafieuse des années soixante, entourée des invités les plus éminents de cette soirée. Elle me répond dédaigneusement que c’est à moi de trouver une solution et de payer avec L., les réparations. J’acquiesce car, après tout, oui c’est un peu de ma faute. Mon humeur festive est anéantie pour le reste de la soirée. En plus je sais que L. n’a pas un rond en ce moment et que, vu la taille des dégâts, ça va coûter un bras.
(I) En devenant étudiante j’ai perdu mon nom. On nous dit, « vous connaissez tous… », « vous avez tous entendu parler de… ». Au début non. Et puis au bout de quelques années, on rit parce que ton père pensait que le Palais de Tokyo se trouvait à Tokyo. On a appris trop vite la langue de l’école. Je dis « pomme » pour parler de la touche contrôle, alors que je n’ai pas les moyens de m’acheter un mac. Mes parents ne comprennent plus que 50% de ce que je dis. Il a plus que 5 typographies existantes. J’étais déjà aller à Paris, en 2010, pour voir la Tour Eiffel. (II) En marchant dans la ville j’ai perdu mon prénom. Les gens sont tous inconnus, ils ne se disent pas bonjour, ni dans la rue, ni dans les commerces, ni sous l’arrêt de bus, ni dans le métro, ni dans les salles d’attente. Mon grand-père me dit, c’est dans la foule qu’on se sent le plus seul, quelque chose comme ça, il faisait sûrement référence à un truc connu que je ne connais pas. Il utilise aussi fréquemment l’expression « de ville » pour parler de ce qu’il trouve chic et approprié, des habits « de ville », des chaussures « de ville », vous savez cette paire en cuir, qui sort du placard pour les mariages, et les enterrements. C’est un concept erroné. En ville, les gens porte des chaussures conçues pour courir ou faire de l’alpinisme. Tu appels ton grand sac de randonnée, le « sac de courses »: on part en bivouac au centre commercial, pendant que les employés communaux ramassent les feuilles mortes pour les mettre à la poubelle. Les premiers pas dans la ville c’est la liberté, on peut aller à la poste en pyjama, tout le monde s’en fiche, ou peut-être que personne ne nous voit tout simplement. On peut se perdre, tomber, répandre ses courses sur le trottoir, pleurer dans la rue, personne ne nous voit. On peut se faire insulter, suivre, coincer contre un mur, personne ne nous voit.
je ferais un meilleur bleu, il est pas assez intense à mon goût.
« F5-F5-F5 ! Les Flics ArrIvEnt ! »
« 1984 n’était pas un mode d’emploi ! »
« Belek aux Handek ! »
l’obscurité collante de sucre et la BO du première étage se superposent aux mèches bleues de l’actrice