« Allez mon vieux ! On se motive, il faut sortir aujourd’hui »
Depuis que sa tête avait éclatée, Ernest peut entendre parler sa conscience. Son ouïe s’était liée à son odorat et à sa vue, en un sens nouveau, auquel il ne s’est pas encore habitué. Il lui a fallut trois jours pour comprendre que les autres entendaient sa voix-qui-a-été-interne.
Il lisait dans une bibliothèque et des gens étaient resté l’écouter : ils ricanaient en silence, quand lui se demandait ce que ces gens-là faisaient ici à le regarder. D’autres se sont fâchés, à raison, alors qu’il pensait à leur physique. Depuis, Ernest préfère garder sa voix à l’intérieur d’un appartement, à défaut d’avoir une boîte crânienne. Ca fait une semaine maintenant, au-dedans, il ne pense qu’à son amende impayée, à ses études qu’il rate, et à ses amis qui ne le voient plus que dans les médias en tant que patient zéro. Il avait débranché son téléphone, que l’Etat et les journaux sollicitaient chaque matins, après une semaine d’indifférence.
Dans les premiers jours, il avait envoyé une lettre à ses parents, pour leur raconter sa mésaventure au Prizunik, l’amende qu’il ne pouvait pas payer, pour laquelle il leur demandait de l’aide, et les rassurer quand à ses études qui, jusqu’ici se passaient tranquillement. Le lendemain, il était retourné au campus mais on ne l’a pas laissé rentrer. La sécurité disait que c’était un fouteur de troubles, qu’il dégoutait les étudiants et que son truc était surement contagieux. Sidéré, Ernest était rentré chez lui prendre une douche et faire semblant d’avoir une vie normale. Un numéro qu’il ne peut plus continuer, par manque de pâtes.
« Au Prizunik, c’est sûr, ils voudront pas me laisser entrer, enfin pas comme ça »
Après plusieurs essais il enfile deux bonnets sur un bol qu’il met sur sa tête. Pas très élégant, certes, mais avec une capuche et un casque sur les oreilles, ça sera, sans doute, moins voyant qu’un moignon de crâne.