914 & Vladimir 1 – Brno
914 inscrit sur la porte. Le voyage de ma valise s’arrête donc ici. Enfin. Je sais qu’il s’agit d’une chambre partagée. Dois-je toquer ? Ou tout simplement ouvrir la poignée de la porte ? Je tente la deuxième option qui ne fonctionne pas. Impatient, je rentre la clef dedans et l’ouvre. Un petit couloir d’entrée. A ma droite je devine la salle de bain. Par terre, des chaussures et sur le porte manteau, un manteau. J’annonce ma présence par un « Hi » et tout de suite, venant de la l’ouverture menant à la chambre, en face, je rencontre mon colocataire. Un visage juvénile surplombé par des cheveux fins châtains, une calvitie lui pousse au même rythme que ses poils de menton. Légèrement plus grand que moi, son corps présente des caractéristiques ectomorphe. Rapidement je me présente pour lui éviter tout malaise face à un inconnu débarquant dans son environnement. J’ai la conviction que cet échange nous apportera des éléments d’appréciations essentiels. Il prend vite la parole et en même temps que je fais le rapprochement de sa tête avec un poisson, je réalise que la communication va être éreintante. Il se présente comme Vladimir, originaire de Russie, qui déteste son pays et que pour cette raison, il a préféré se réfugier en Tchéquie. La rapidité des mots qu’il balance sans même faire attention que je les ai bien réceptionné me dévoile un caractère intimidé et sur ses gardes. Il en arrive vite à des points de vie communes qui m’étonnent à savoir si je dors la fenêtre ouverte ou si je me couche tard le soir. Les 48h de transport bouillonnent mon être, je lui réponds machinalement, en prenant conscience que je n’ai plus envie de communiquer. J’essaie tout de même de m’intéresser à lui et il m’apprend qu’il étudie l’informatique, les ordinateurs et les logiciels. Ma grande passion, je suis sous le charme. Dégouté de ne pas pouvoir échanger plus longtemps sur ce sujet face à mon ignorance, je lui demande à quel fréquence il sort et s’il s’est fait des amis. Sa réponse m’a achevé. La dernière fois qu’il est allé boire une bière était l’été dernier, et ça lui a permit de comprendre qu’il n’aimait pas ça. Enfin, Vladimir n’a pas d’amis. Alors me voila finalement arrivé dans cette chambre sans jamais n’avoir rien espéré de cette rencontre pour ne pas être déçu. Une déception m’envahit pourtant. Lui méfiant et moi contrarié et nous deux seuls, je m’en vais faire des courses pour ne pas partager mes larmes.