Escapade nocturne
Il est 5h30 du matin, impossible de respirer. Je cherche l’air comme un poisson cherche l’eau lorsqu’il est en dehors. Je siffle, je tousse et je pense à toi. Comment cela c’est passé pour toi ? J’ai peur, j’ai mal, mal au coeur et mal aux poumons. Je le réveille, on part.
Sur la route, je t’imagine, seul, dans cette pièce qui devait surement être suffocante pour toi. Je te vois, te pencher par la fenêtre pour chercher l’air, comme un petit poisson, tes branchies ne fonctionnent plus, ou fonctionnent mal.
Comment cela c’est-il passé ?
J’ai peur, je tremble, je pleure dans mon coeur, tu me manque.
On arrive aux urgences. Plus que quelques mètres et je serais prise en charge. Pourquoi tu ne les as pas appelé si ça n’allait pas ? Pourquoi il a fallu que tu sois inerte, sur ce sol dur pour que quelqu’un s’occupe de toi ?
Je m’essouffle a expliquer à l’urgentiste mon problème. Tellement que la dame écrit mal mon adresse. Tant pis, je suis à bout, je corrigerais plus tard.
Et toi, comment cela c’est-il passé comme tu ne pouvais plus parler ?
On me prends en charge, électrode, prise de sang, perfusion, je suis tendue et j’ai peur. Je serre le point et je pense encore à toi. Seul dans cette ambulance, seul dans ce grand hôpital, seul jusqu’à l’aube ou nous accourons pour te voir. Mais il est déjà trop tard.
Je pense aussi à lui. D’ailleurs j’y pense souvent. Et je pense que tu es fier de sa nouvelle orientation professionnel. Il n’a pas pu te sauver, mais il en sauvera d’autre et chacun de ces autres auront une petite part de toi car ils ont une petite part de lui.
On me met un masque d’oxygène qu’ils appellent aérosol et je respire enfin. De la vapeur se dégage du masque et je souris en m’imaginant comme un singe ou un cheval avec de gros naseaux lors d’une matinée d’hiver.
Je m’égare et je m’endors.
Je t’aime.