ex aequo
Je ne te reverrai jamais, dis-je, et lui : « regarde tes mains. » Elles sont toutes écorchées et sous les ongles une nappe de copeaux argentés. Nous sommes ex aequo. Ma question passe à la trappe. Sa nuque à lui, il y a une heure de ça, portait un bijoux brillant très simple. Une chainette avec en pendentif des initiales. Cadeau ou trophée de guerre, la breloque qui décorait son cou, avait laissé une marque sur sa peau en s’en allant. Elle avait disparu. Il louvoie devant moi, parce qu’il a bu probablement, ou qu’il peine à reprendre son souffle, mais son cou est distinct. Faut dire que dans la course on ne s’est pas ménagés. Pourtant j’ai épié les recoins et mes cuisses claquaient et ma bouche était sèche. Je voulais me planquer, l’esquiver même fondre. Derrière je l’entendais tonner, rouspéter avant qu’il se mette à cracher. Tout a changé quand son épaisse bile en monticules à commencer à garnir le sol. C’est des agglomérats de bave qui se sont pavés sous mes cuisses qui claquaient toujours. Mon pieds sursaute. J’ai glissé sur sa morve, mon coude a cogné la jardinière, mais mon genoux était bien contre un mégot. Il y a cinq doigts sur ma main droite mais c’est souvent l’ongle de mon majeur qui mécaniquement se croche. C’est dans son sautoir ici qu’il est venu se pincer. Il n’a pas ressenti le pincement. Hâtivement, il m’a repris la photo de nous, dans mon blouson. Celle ou ma frange est biscuit et ses dents sont caries. Son souffle est court toujours, à bout, il s’éloigne. Dans la perte nous sommes ex aequo. Comment on fait s’épouser deux lettres?