Je crois que j’ai emprunté la mauvaise route. Elle est pourtant indiquée comme la principale, celle qui mènent directement à l’endroit le plus haut et le plus froid de la montagne. Et pourtant, j’ai réussi à me perdre sur cette route. Mon équipement m’encombre et me courbe. Ça fait une heure que je me dit que je ne vais pas dans la bonne direction mais comme c’est écrit sur les panneaux, je me suis persuadée que c’était la bonne. Je regarde les petits sentiers, ceux qui mènent à la grande forêt. Je m’arrête et tend mon oreille, j’entends qu’elle vit sans arrêt. Il y fait sombre, mais j’imagine qu’au centre il y a un puits de lumière, ou bien que les feuilles la laissent entrer. Puis mes yeux se tournent vers les grandes plaines, sans panneaux, sans routes, avec rien. Ça me fait peur, on ne voit pas la fin. Je suis sur que si l’on court toujours tout droit, on se retrouverait au même endroit.
Rien n'a changé dans cette chambre tu sais
Il y a toujours ton lit deux places au milieu de la pièce, j'en étais jalouse tu te souviens, moi aussi j'en voulais un
Il y a ton bureau dans l'angle, là où tu passais le plus clair de ton temps assis dans cette chaise noire
À vrai dire tout est noir dans cette chambre : le papier peint, le tapis, les coussins, les couvertures
C'était ta couleur
Tout, sauf les vêtements dans ton armoire
Tu es parti avec les noirs et tu nous as laissé les couleurs
Ton enfance, les rires, les joies, les souvenirs
Rien n'a changé dans cette chambre tu sais, tu peux encore revenir
L’avantage d’être aveugle c’est de ne pas te voir en crocks.
–> le bonheur, c’est le temps que tu accordes à ta joie
C’est dur de se dire que c’est réel. Je mesure moins d’un mètre et le monde que je vois me terrifie. Trop grand, trop loin, trop. Je fais pourtant des efforts mais l’extérieur me paralyse. Voyez ça comme un jeu vidéo dans lequel vous ne passez pas le niveau. Vous mourrez avant d’arriver à la fin et vous revenez au début. Encore et encore. Le bouton « ABANDONNER » vous nargue sans cesse mais vous persistez et luttez pour sortir du niveau sans échouer. J’ai alors arrêté d’aller vers la sortie. Je suis coincée au niveau -20. Dans six jours, j’aurais vécu pour les autres. Dans six jours, je ne pourrais pas faire marche arrière. Peut-être que dans six jours j’aurais passé le niveau.
Dans tes yeux il y a autant de soleil que quand tu me regardes je bronze.
ne pas s’agiter, ne pas sommeiller, ne pas faire semblant
Il est de ces jours où la lumière fait qu’on pourrait tout aussi bien être ici qu’ailleurs. On imagine le front de mer à l’angle de la prochaine rue. Aujourd’hui fait partie de ces jours-ci. Sur l’escalator, je ne vois que le ciel et la cime des arbres. Je l’imagine déboucher sur un grand carrefour, un de ceux que je haïs d’habitude. Mais aujourd’hui je me plais à l’imaginer comme le départ d’une infinité de rues inconnues dans lesquelles il me suffirait de déambuler pour recommencer à voir, outrepasser cette sensation d’immobilité. Car la réalité est qu’on est bien seuls dans notre monotonie.
Et le soleil d’automne durerait ainsi une éternité.
DOUDOUNE MOLLETONNÉE/MATELASSÉE BLEU MARINE/FONCÉ
LUNETTES TRÈS RONDES/CIRCULAIRE ET TRÈS ÉPAISSES/LARGES
SOURCILS TRÈS ÉPAIS/GARNIS/CHEVELUS/TOUFFUS
Aujourd’hui j’ai vu un monsieur très atypique lorsque j’ai visité la cathédrale. Il était assis au fond à droite. Il se tenait très droit, avait des lunettes très rondes et très épaisses. Son manteau était molletonné et son nez était très pointu. Il penchait un peu la tête sur le côté. Il avait les mains jointes.
Il m’a fait de la peine.
Je crois que les personnes atypiques – comme lui – me font de la peine.
– Ne pas être virtuose. –
Il est 8h06. Le jour se lève. Depuis le velux, on aperçoit le petit port, et la mer à perte de vue. Le ciel est jaune, rose, bleu et vert, un dégradé de lumière apparaît. Il semble se refléter sur le toit des maisons qui sommeillent encore. Tout bruit est décuplé. Du roulement des vagues au piaillement des oiseaux. Un chien aboie, l’île l’a entendu. Sans un bruit on se lève, on descend les vieux escaliers en bois, et on profite de ce calme alympien, avant que le jour prenne le dessus sur la vie.
L’appart est sans dessus dessous, une courge attend toujours d’être cuite. Un coup de fil, plus de soucis… Il fait encore beau et les copains vont au parc pour faire de la Slackline. Je m’améliore mais assez rapidement c’est la nuit, le froid tombe qui nous enveloppe, il est temps de nous réchauffer. Un café puis un thé s’enchaînent un autre accompagné du vinyle des Pink Floyd ..