en replantant mes doigts dans le coton je m’y suis egratigné
ça pu le fromage
ça sent la sardine
j’ai les oreilles qui sifflent
en replantant mes doigts dans le coton je m’y suis egratigné
ça pu le fromage
ça sent la sardine
j’ai les oreilles qui sifflent
ils me maintiennent la tête sous l’eau
les bulles sortent mais n’éclatent pas
il n’y a plus de surface
je n’ai plus rien
plus rien
plus rien à part ma tête
et même ma tête n’est pas complète
je n’ai plus de bouche
les bulles sortent par le nez
je suis dans un coton un peu trop dur
un peu trop mou à certains endroits
filandreux sur les bords
et mousseux au milieu
des poils entre les lignes m’ont fait éternuer
dégât des eaux au rez de chaussé
Parfois Doug s’allonge sur la table
nu comme un vers
et sa bite tape sur la table au rythme de la musique
c’est souvent quand on se réveille en pleine nuit d’une insomnie
c’est bizarre d’ailleurs c’est toujours en même temps
on va donc dans le salon avec les lumières éteintes
on allume juste le faux feu sous l’arbre en pot
et dans ces moments là je l’écoute débiter des banalités
avec en arrière fond le bruit de sa queue sur la table en bois
mes paupières s’alourdissent
et je m’endors sur le canapé
le matin je me réveille quand la lumière rentre par la fenêtre
il est toujours au même endroit
endormi la bouche ouverte
son penis ne bouge plus
juste des petits sursauts de temps en temps, comme les chiens qui rêvent et courent dans leur sommeil
ou comme un poulet à qui on aurait coupé la tête
je vais alors me recoucher dans notre lit
il me rejoint un peu plus tard avec son corps tout froid et son kiki tout petit
je me pousse et lui s’allonge
sous la table il y a un monstre
derrière le rideau il y a un monstre
dans le coin derrière le radiateur il y a un monstre
dans la poitrine il y a un monstre
sous le tapis il y a un monstre
derrière la porte il y a un monstre
dans le coin de l’oeil il y a un monstre
dans le pommeau de douche il y a un monstre
sous le cuir chevelu il y a un monstre
Doug est revenu aujourd’hui
sa valise était pleine de merde
on lui a demandé d’où il venait
où il était passé
il est resté muet
il est allé s’enfermer dans ma chambre
il s’est endormi sur mes draps
parfois on lui dit que ça tourne pas rond la dedans
tout ça parce que les gens ne comprennent pas bien qu’est ce que c’est que cette suite de mots
qu’est ce que c’est que ces images étranges qu’il laisse descendre de façon si élégante par sa langue en escalier
lobotomisé par une énorme chose sans nom
elle écrase tout, tout tout tout
elle met tout à la poubelle devant la maison
celle à côté de la boite aux lettres
moi je vais fouiller la bas quand la grosse bête tourne le dos ou se gratte le dessous des pâtes
quand je marche je boite
ma pâte traine derrière moi
elle s’allonge, elle est restée coincé entre deux poubelles qui venaient d’être vidées
les gens marchent sur mon mollet
ça fait mal mais je ne pipe pas mot
je fais profil bas
dans un brouillon de vermicelle j’y ai perdu ma cuillère
le drap de dessous est taché d’urine
l’huile flotte dans l’eau
ça sent le violet
c’est pâle et épais
au touché ça prend la forme d’un intérieur de crustacé
un mollusque
une odeur de parfum de vieille
l’apogée du fumoir sans aération
dessiner un patron
un carré qui court sur la plage
une bouteille à la mer
une dissonance sous l’eau
un placard à balais sans verrou
l’étanchéité du rejet
derrière la porte le calme fait du bruit
Doug respire fort juste à côté de mon visage
je sens son souffle chaud qui sent vaguement la cuisson au beurre
il est malade
le rhume ne le lache plus
il l’enlace et l’embrasse langoureusement
ça mousse autour de la bouche
il a des problèmes intestinaux aussi Doug
j’ai toujours défendu que sa mollesse était normale
« mais non il est pas bizarre, c’est juste qu’il est un peu à l’ouest, dans son monde »
oui il passe des heures face à un mur rouge sans parler
et alors?
mais enfant il avait des problèmes de foie, son foie est promis à disparaître
Doug est un microbe
une plaine de plis
au fond d’un sceau ton visage se reflète
c’est Narcisse qui à craché dedans
un molard aussi gros que mon poing
ça flotte sans faire de vagues
la couleur du vinaigre dans les rides de ton front
Un désert avec des sous-marins qui apparaissent du vide, du saturé
Un peu comme dans une usine
là où les chaussettes se tricotent à la que leuleu
des choses très coordonnées dans un grand n’importe quoi
pas réussir à tout saisir parfois
essayer de parler, de montrer un monde sous-marin
sous-jacent
dans un rond il y a mis son doigt
c’était violet et tendre
musqué et voilé
dense et fourbe
la tête encore toute mouillé
sous le pieds une épine
son dos est rugueux et pale
un bleu vert d’eau tendant vers le rose
le pré de colchique se déploie sous le préau de son école
il a vomi sur ses talons
après avoir vu éclore un coquard un peu trop sombre au coin de son arcade
c’est un glissement de nénuphar
« dans un paragraphe parsemé d’ongles coupés de la veille
il y a eu un tremblement
c’était quand tu avais posé ta main sur mon ventre sans avoir prévenu comme tu le fais d’habitude »
c’est les derniers mots que m’avait écrit Doug sur un papier laissé sur la table de la cuisine avant qu’il claque la porte pour aller à un enterrement
sans les guillemets biensur
Quand je l’ai rencontré,
Doug avait encore toute sa tête
c’est notre manie à essayer de tout décortiquer qui lui a fait perdre la boule
notre obsession de se le partager à part égale qui lui a fait péter une durite
notre souffle sur ses couilles qui l’a rendu marteau
nos ordres dès le réveil qui lui ont fait perdre la boussole
nos ongles qu’on ne voulait pas couper et qui lui lasseraient le dos quand on faisait l’amour qui lui ont fait perdre les pédales
nos courses à la montre pour savoir qui irait le plus vite pour acheter une boite d’oeuf et un shampooing en apnée qui lui a fait yoyoter de la cafetière
je commence à avoir des remords
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