Le jeu se termine, le héros a accompli toutes ses missions,
rallié au cours de son voyage une communauté toute entière
qui l’a accompagné dans sa quête d’objets magiques,
qui l’a soutenu dans ses combats.
Il avance maintenant seul sur le chemin de l’affrontement final,
fort de son expérience, transformé.
Prêt à anéantir son dernier démon, et ainsi clore l’épopée.
J’ai trouvé des mots pour ces sentiments et tout est plus clair.
Une exemple de plus du le miracle du langage,
nommer une chose permet de mieux l’appréhender.
[Du latin apprehendere « prendre, saisir, attraper »]
Saisir par l’esprit, comprendre.
Morris B. Holbrook (1993) voit dans la nostalgie un vrai sentimentalisme,
puisqu’elle se manifeste selon lui par une attirance pour « des objets (des personnalités, des endroits
ou des choses) qui étaient plus familiers (populaires, à la mode, ou largement diffusés) quand la
personne était plus jeune (dans les débuts de sa vie d’adulte, dans son adolescence, dans son enfance,
ou même avant sa naissance) »
D’après la définition de Simon Reynolds, dans son ouvrage au titre piquant, Rétromania, le
rétro […] « a généralement trait aux artefacts de la culture populaire »
Les enjeux sociaux et communicationnels du phénomène rétro
Coralie Gardet – 2013
« En voyant l’immense forêt d’Uraba depuis l’embarcation qui les emportaient vers leur nouveau destin, Delaura reconnut les nostalgies qui tourmentaient sa mère durant les hivers lugubres de Tolède.
Les crépuscules hallucinants, les oiseaux de cauchemar et les pourritures exquises des mangroves évoquaient en lui des souvenances bien-aimées d’un passé qu’il n’avait pas vécu. »
– Gabriel Garcia Marquez
Les lumières jaunes des lampadaires glissaient sur nos visages à intervalles réguliers pendant qu’on traversait la nuit bleue.
Je percevais à peine le murmure des filles depuis l’avant du Traffic, où la musique de l’autoradio masquait leurs voix, les rendant indistinctes malgré mes efforts pour comprendre leurs paroles.
A côté de moi, le chauffeur demeurait silencieux, l’air entièrement absorbé par la conduite.
A quoi pensait-il ?
Silencieuse également, je profitais du confort apporté par la quiétude de l’habitacle, appréciant passivement la présence des autres, la sensation de la route sous les pneus, les lumières de la nuit qui m’avaient tellement manqué.
On s’installe à table de la cuisine et son regard passe rapidement sur moi.
J’aimerais bien savoir ce qu’il voit.
La pièce est lumineuse, pleine de plantes.
Souvent je grignote ou je bois à petites gorgées un thé brûlant.
Il me demande si ça va, si je mange correctement et je réponds toujours oui.
Ensuite il me parle d’un sujet dont je ne sais rien et qui ne concerne aucun de nous deux,
mais qu’il maîtrise depuis longtemps.
Alors je m’y intéresse, je pose des questions et il me fait des réponses que j’ai du mal à comprendre,
pendant qu’on s’épie par dessus la table en bois.
Ca ressemble à une discussion mais ça n’en est pas une.
Enfin pas vraiment,
mais c’est comme ça qu’on fait.
En rentrant de la gare, j’ai pensé à libérer cette décision
qui tourne en rond dans ma tête,
qui rugit dans ma tête.
Mais elle a des dents,
elle a des griffes et des piques,
et je ne sais pas quoi en faire.
Je pense la garder encore un peu
à l’abri dans ma tête.
L’impression fugace de retrouver un peu de cette
paix originelle à l’existence incertaine,
sûrement oubliée juste avant ma naissance.
Besoin de faire un point, juste pour voir.
Alors je les ai observés étalés là, leurs différentes formes aplaties sur le papier brillant.
Exposés sous mes yeux, ils formaient un espèce de tout étrange, et bizarrement cohérent au fond
ça me ressemblait presque.
Il me semble que certaines sources se sont taries.
Parmi elles l’aventure, que je considère comme une des principales sources de satisfaction et d’attentes dans un avenir proche.
Souvent j’ai dû faire mon sac dans l’urgence du départ, conséquence d’une proposition inattendue, parfois faite à un évènement auquel je me trouvais plus ou moins par hasard.
Quand aucun maillon n’est entravé, une réaction en chaîne s’enclenche, ouvrant une voie vers la nouveauté, l’inconnu est excitant.
Par dessus tout, le fait de se mettre en action vers un nouvel objectif, potentiellement aussi précis qu’un point géographique donné, offre la joie simple d’une légèreté nouvelle, loin du vague et répétitif ennui du quotidien.
Comme plonger dans l’eau glacée exalte nos sensation corporelles, nous rendant plus que jamais conscients de la peau qui le recouvre, ou encore du sang propulsé dans les circuits de notre corps,
l’aventure,
(le voyage)
stimule notre être tout entier.
Certains courants de pensée affirment que l’être humain est mauvais par essence,
que pour cela, il doit passer son existence à expier ses fautes.
Cette alternative semble plus supportable que de concevoir
Que nos souffrances n’ont pas de sens
et que l’Univers est silencieux.